Expressions filées

La chanson, art majeur ou art mineur, III. Les expressions toute faites chez Brassens 7/10
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Certaines citations ou expressions sont égrenées par Brassens tout au long de nombreuses chansons. Je pense à « effeuiller la marguerite », aux « Dames du temps jadis » de François Villon et à son vers « Mais où sont les neiges d’antan ?». Cette marguerite, ces belles dames et ces neiges d’antan sont filées, parfois entremêlées, au long d’une grosse douzaine de chansons. Cette répétition à mi-chemin de l’invention et de la citation participe à l’univers nostalgique et stéréotypé de Brassens, au même titre que son village conventionnel.

Revue de détail.

« Mais où sont les neiges d’antan » devient « Mais où sont les funérailles d’antan ? » dans Les funérailles d’antan. Dans Le temps ne fait rien à l’affaire, les vieux cons deviennent de « vieux cons des neiges d’antan ».

Dans Élégie à un rat de cave : « Mine de rien tu es allée faire / Ton trou dans les neiges d’antan ». Chanson où l’on peut aussi entendre :
Désormais, c’est pas des salades
Parmi Flora, Jeanne, Thaïs,
J’inclus ton nom à la Ballade
Des Belles Dam’s du Temps Jadis.

Dans Le fantôme :
Eh bien, messieurs, qu’on se le dise
Ces belles dames de jadis
Sont de satanées polissonnes
Plus expertes dans le déduit
Que certain’s dames d’aujourd’hui,
Et je ne veux nommer personne !

Dans Le vieux Léon :
Si d’ temps en temps
Un’ dam’ d’antan
S’ laisse embrasser
Sûr’ment papa
Que tu r’grett’s pas
D’être passé

Dans Les amours d’antan :
C’étaient, me direz-vous, des grâces roturières,
Des nymphes de ruisseau, des Vénus de barrière…
Mon Prince, on a les dam’s du temps jadis qu’on peut…

Plus loin dans la même chanson :
La marguerite commencée avec Suzette,
On finissait de l’effeuiller avec Lisette

Dans Le moyenâgeux :
Ma dernière parole soit
Quelques vers de Maître François,
Et que j’emporte entre les dents
Un flocon des neiges d’antan.

Dans Le passéiste :
Quitte à froisser la marguerite,
Faut que je dise
Que tu es ma fleur favorite,
Myosotis.
Si les neiges d’antan sont belles,
C’est qu’les troupeaux
De bovins posent plus sur elles
Leurs gros sabots.

Dans Discours de fleur :
Les « je t’aime un peu beaucoup »,
Ne sont guère de mon goût,
Les serments d’amour m’irritent,
Se plaignait la marguerite.
Car c’est là mon infortune,
Aussitôt que débute une
Affaire sentimentale,
J’y laisse tous mes pétales.

Dans La non demande en mariage :
À aucun prix, moi je ne veux
Effeuiller dans le pot-au-feu
La marguerite.

Dans Le testament :
En effeuillant le chrysanthème
Qui est la marguerite des morts

Dans Sale petit bonhomme :
Avisant, oubliée, la pauvre marguerite
Qu’on avait effeuillée, jadis, selon le rite
Quand on s’aimait un peu, beaucoup,

Dans Saturne :
Viens encore, viens ma favorite,
Descendons ensemble au jardin,
Viens effeuiller la marguerite
De l’été de la Saint-Martin

Dans Cupidon s’en fout :
On effeuilla vingt fois la marguerite,
Elle tomba vingt fois sur « pas du tout ».
Et notre pauvre idylle a fait faillite,
Il est des jours où Cupidon s’en fout.

Que choisir ? Je vous passe Cupidon s’en fout, par le duo Contrebrassens.

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13 commentaires sur “Expressions filées

  1. C’est un vrai régal et une leçon de constater la façon dont le poète renouvelle ses formules et donc nous habitue à son style…c’est sans doute pour ça que tu as raison de parler de nostalgie…
    très beau Cupidon s’en fout et plus loin la Princesse et le père Noël sont de belles interprétations
    Bravo les duos…( pas Contrebrassens mais avec..) Patrick H.

    Aimé par 1 personne

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