L’Aziza

Les Juifs et la chanson IV – Image des juifs dans la chanson 7/19

L’Aziza est l’un des plus grands succès de Daniel Balavoine. Cette chanson évoque plutôt le monde arabe, le Maroc en l’occurrence (« petite rue de casbah au milieu de Casa », diminutif de Casablanca). Cette chanson antiraciste (même si Balavoine se méfiait de cette étiquette) date de 1985 et est une réaction aux premiers succès du Front National. Il y a une seule allusion claire au judaïsme dans la chanson : « Ton étoile jaune c’est ta peau ». J’apprends sur la notice wikipedia de la chanson que cette phrase s’adressait peut-être  à l’épouse de Balavoine, juive marocaine.

Le clip :

À la télé, en octobre 1985, quelques semaines avant le décès de Balavoine.

Il est singulier que les deux chansons françaises les plus connues de cette série soient L’Aziza et Le zizi.

1 – Le chandelier
2 – Le mot « juif » dans des listes
3 – La chanson anticléricale œcuménique
3bis – Souchon et Ferré
4 – Le juif non-dit
5 – Les juifs chez Gainsbourg
6 – Un juif célèbre
7 – L’Aziza
8 – La chanson pro-israélienne
9 – Le conflit israélo-palestinien
10 – Image des juifs dans le rap
11 – L’anti-antisémitisme de Pierre Perret
12 – La chanson antisémite
13 – On peut rire de tout, mais pas en mangeant du couscous
14 – Les mères juives
15 – Betty Boop
16 – Noirs et juifs aux USA
17 – Nica
18 – Noirs et juifs en chanson chez Jean-Paul Sartre
19 – Azoy
19bis – Retour sur quelques commentaires

 

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Au fil du temps

Les Juifs et la chanson III – Shoah et chanson 16/23

La plupart des chansons passées jusqu’ici sont l’œuvre de chanteurs et chanteuses juifs, dont la famille a été parfois touchée directement par la Shoah. Dans ce billet, je vous propose un tour d’horizon chronologique de plusieurs chansons d’auteurs a priori non-juifs (je n’ai pas vérifié la biographie de tout le monde …) qui chantent la Shoah. L’évolution dans le temps est intéressante.

La première chanson ne concerne pas directement la Shoah. Elle parle du Vélodrome d’hiver à Paris, un lieu de fête populaire et de meetings politiques avant-guerre, ainsi que se le remémore Yves Montand. Les « six jours » mentionnés dans les paroles, ce n’est pas la création du monde dans la Genèse, ce sont les Six jours de Paris, fameuse course cycliste. C’est au Vel’ d’Hiv qu’ont été parqués les 13 000 juifs arrêtés le 16 juillet 1942, lors de la plus grande rafle organisée en France. Aujourd’hui, « Vel’ d’hiv » évoque la rafle du Vel’ d’hiv, pas le cyclisme sur piste… La chanson montre bien que dans les années 1950, il n’en était rien.

Avec les Juifs de Pierre Selos, chanteur engagé dans le catholicisme à ses débuts. On est en 1964.

La petite juive de Maurice Fanon, en 1965.

Petit Simon d’Hugues Aufray en 1967, paroles de Vline Buggy.

Paul Louka, Tante Sarah en 1972.

Chanson pour Anna, en 1974, paroles et musique de Pascal Danel, interprétée par Daniel Guichard

En 1977, dans son concept-album Simon et Gunter, Daniel Balavoine nous raconte l’histoire de deux frères allemands séparés par le mur de Berlin. Une chanson de l’album, Lise Altmann, est consacrée à la Shoah.

En 1986 , Gilbert Bécaud compose une comédie musicale, Madame Rosa, adaptée par Claude Lemesle du roman d’Émile Ajar, La vie devant soi. Extrait : Bravo, par Annie Cordy. Première chanson de la série qui évoque explicitement le rôle des Français dans les déportations.

Anne ma sœur Anne, en 1985, Louis Chédid (qui fait son entrée au 1007e billet de ce blog). Je crois que c’est la première chanson de la série qui évoque le retour de l’antisémitisme après-guerre. La chanson date à peu près des premiers succès électoraux du front national.

Souviens-toi du jour en 1999, interprétée par Mylène Farmer. À la fin de la chanson, elle chante « Zakhor et yom », ce qui signifie « Souviens-toi du jour » en hébreu. Les paroles disent en boucle « si c’est un homme », allusion sans ambiguïté à Primo Levi. Mylène Farmer porte une robe Thierry Mugler. Analyse du clip, ici.

L’ami Jacob, en 2007, de Pascal Danel, qui avait déjà écrit la Chanson pour Anna en 1974 pour Daniel Guichard.

Fatigué, fatigué, de François Morel. On est en 2010.

1 – La chanson de Simon Srebnik
2 – La chanson de Treblinka
3 – Yisrolik
4 – Le chant des marais
5 – Le Verfügbar aux Enfers
6 – Casimir Oberfeld
7 – Êtes-vous heureux ?
8 – La fontaine endormie
9 – Il n’y a plus de roses rue des Rosiers
10 – Le petit train de Rita Mitsouko
11 – Comme-toi
12 – Nuit et brouillard
13 – Smoke gets in your eyes
14 – Pitchipoï
15 – Évariste
16 – Au fil du temps
17 – Les Ramones à Bitburg
18 – Signé Furax
19 – Des voix off
20 – Roméo et Judith
21 – Culture du camp
22 – La troisième symphonie de Górecki
23 – Beltz

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Homogénéité du timbre

Ambitus, tessiture et notes extrêmes 5/11
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Vous avez peut-être remarqué dans les billets précédents : les voix de Guy Marchand, Julien Clerc et Balavoine sont très différentes entre le grave et l’aigu, tandis que celle d’Édouard Khil est plus homogène. Ce dernier était un chanteur classique de formation, l’homogénéité du timbre est un critère esthétique très important dans le chant classique.

On retrouve cette qualité chez une chanteuse comme Édith Piaf qui n’avait pas un ambitus exceptionnel, mais un timbre particulièrement homogène. À l’inverse, un manque total d’homogénéité peut être recherché, comme dans le yodel, où le basculement brusque de la voix de tête à la voix de poitrine est un ornement qui signe le genre. Le yodel pâtit d’une image kitsch, mais au service d’un bon blues, ça peut être pas mal. Blue Yodel No 5, par Gene Autry.

Dans d’autres musiques populaires, ou même dans le rock, les passages brusques tête-poitrine sont utilisés. The Cranberries, Zombie.

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SOS

Ambitus, tessiture et notes extrêmes 1/11
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C’est la rentrée, après la longue énigme de l’été, les séries thématiques reprennent. Tout comme l’an dernier, il y aura un super-thème (révélé dans quelques jours) qui durera toute l’année, entrecoupé d’autres séries. C’est le moment idéal pour faire un peu de publicité à votre blog préféré : un petit partage Facebook, un envoi à vos bons amis. Vous n’aimez pas ce blog ? Envoyez-le à vos ennemis, je prends tout le monde.

Toutefois, je vous préviens : le blog souffre d’un mal aigu et il y aura des conséquences graves. Et oui, on étudie l’ambitus à partir d’aujourd’hui. L’ambitus, c’est l’écart entre la note la plus aiguë et la plus grave d’une chanson, d’un chanteur, d’un instrument, ou de n’importe quoi qui produit des notes de musique. Quelques chansons sont connues des amateurs de karaoké pour leur grand ambitus. Les chanter relève d’un exploit requérant de bonnes prédispositions et une technique vocale sûre.

L’exemple le plus connu est probablement le SOS d’un terrien en détresse. Amateurs de solfège : son ambitus est de deux octaves et une quinte. Bravo à Daniel Balavoine, créateur de cette chanson. D’après le témoignage de Luc Plamondon, auteur des paroles, il manquait une grande chanson au personnage de Johnny Rockfort dans l’opéra rock Starmania. Il a écrit des paroles et a demandé à Michel Berger (compositeur de cet opéra) une musique à la mesure des possibilités vocales de Balavoine. Le SOS est donc la dernière chanson composée pour Starmania… Pour en savoir plus, écoutez l’émission Étonnez-moi Benoît du 13 mai 2017, avec une longue interview de Plamondon par Benoît Duteurtre. Ici.

Bravo aussi à Grégory Marchal et aux autres aventuriers de l’ambitus qui ont pu chanter le SOS du Terrien en détresse. Grégory Lemarchal prend la chanson un demi-ton au-dessus de Balavoine. Il faut dire qu’il est à la peine dans le grave : il n’arrive pas à timbrer les notes les plus basses, qui sont un peu sacrifiées. Mais sa version est assez propre, surtout pour du live, et paix à son âme. Ça se termine sur une tierce picarde, petite porte ouverte vers le kitsch.

Puisqu’on parle de kitsch, je vous propose aussi la version du chanteur kazakh Dimash Kudaibergenov, lors d’une émission de télé-réalité chinoise. Il est un demi-ton plus haut que Marchal, et donc un ton plus haut que Balavoine. À chaque aigu, on nous montre la déconfiture de ses adversaires… J’adore, c’est un hymne à l’angoisse existentielle des bricoleurs : « pourquoi je visse ? ».

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Est-ce la bonne ?

Homme au féminin, Femme au masculin 4/5
1 – 2 – 3 – 3bis – 45

Finalement, pourquoi devrait-on être une femme pour chanter une chanson de femme ? Parce que zut, Jacques Brel est-il un soir d’été ? Georges Brassens est-il fossoyeur ? Est-il pas du tout l’antéchrist ? Claude Nougaro est-il sous mon balcon ? Georges Guétary est-il Robin des Bois ? Alain Souchon a-t-il dix ans ? Est-il carrément méchant ? Et est-il bidon ? Johnny Hallyday est-il l’idole des jeunes ?  Joseíto Fernández est-il un homme sincère ? Allain Leprest est-il nu ? Léo Ferré est-il un chien ? Michel Sardou est-il pour ? Serge Lama est-il malade ? Les Beatles sont-ils le morse ? Boris Vian est-il snob ? Johnny Hess est-il swing ? Claude Barzotti est-il rital ? Renaud est-il une bande de jeunes à lui tout seul ? Elíades Ochoa est-il charretier ? Robert Charlebois est-il reparti sur Québec Air ? Aznavour est-il un homme (oh, comme ils disent) ? Serge Gainsbourg est-il un homme (à tête de chou) ? Est-il poinçonneur ? Et est-il venu me dire qu’il s’en allait ? Daniel Balavoine est-il pas un héros ? Et est-ce qu’il s’appelle Henri ? Michel Polnareff ou William Sheller sont-ils fous de nous ? Claude François est-il mal aimé ? Bigflo et Oli sont-ils ?  Alors pourquoi ne chanteraient-ils pas des chansons de femmes ?

Mathieu Rosaz livre une belle contribution au débat, avant de reprendre Si la photo est bonne, de Barbara.

Mathieu Rosaz a bien raison : la chanson n’est pas simple à reprendre pour un homme. Mais pourquoi se l’interdire, car finalement, si l’interprète devait vraiment coller au personnage de la chanson, et bien pour chanter Si la photo est bonne, il faudrait non seulement être une femme, mais en plus être une authentique femme de président. Quelle idée ridicule, vous voyez Tante Yvonne chanter du Barbara ? Quoique …

 

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