Igor Stravinsky et Serguei Rachmaninov

Livraison bakchich prodigieux pour régime de l’Amérique 4/8

Les plus grands compositeurs russes se sont intéressés à l’hymne national américain, ne me demandez pas pourquoi ce mystère. Sergei Rachmaninov a proposé un arrangement pour piano qui met bien en valeur l’entrelacement du chant et du contrechant un peu plus grave vers la fin (à peu près à 1:00 sur la vidéo).

Igor Stravinsky, fraichement réfugié aux États-Unis a proposé un arrangement pour orchestre en hommage à sa nouvelle patrie, qui pour le remercier lui a envoyé la police au titre d’une loi du Massachusetts qui interdit de modifier l’hymne. Voir la chronique de Max Dozolme sur France Musique qui relate cette étrange affaire, ici.

Bon, tout ça ne nous dit pas quel nouvel hymne proposer. Au temps des faits alternatifs réfléchissons aux hymnes alternatifs. La Belgique a Le plat pays de Jacques Brel, gloire à la nation belge d’avoir adopté comme hymne de cœur un chant aussi beau et mélancolique.

La France, pays profondément réactionnaire, a élu en 1981 un homme de droite à la présidence : François Mitterrand. La preuve, ce dernier est revenu sur la réforme la plus importante de son prédécesseur : le changement du tempo de La Marseillaise, prérogative régalienne ultime, seul véritable bouton rouge à la disposition du bon plaisir de notre monarque constitutionnel, actionné par un certain Valéry Giscard d’Estaing, récemment disparu, et qui devrait être un sacré gauchiste pour oser faire ça. En fait, je crois même me rappeler que ce dernier préférait à notre hymne national Le régiment de Sambre-et-Meuse, un chant purement militaire assez célèbre jadis, mais impossible de remettre la main sur cette information. L’histoire de Sambre-et-Meuse n’est pas encombrée de révolutions et ses paroles n’ont rien de sanguinolent. L’idée de la proposer comme nouvel hymne est tellement con que je suis étonné qu’on n’en parle pas du tout aujourd’hui. Pourquoi pas plutôt l’anti-hymne Hexagone de Renaud ? Voilà notre authentique hymne alternatif, bien plus franchouillard qu’il n’y paraît.

Et les USA ? Ils ont This land is your land, de Woody Guthrie, chant contestataire de l’âme profonde de l’Amérique. God save the queen est écrit à la troisième personne. La Marseillaise à la première personne du pluriel (« allons enfants … », « contre nous …», « nos sillons », « marchons », …). Je trouve qu’un hymne écrit à la deuxième personne (« your land »), voilà, ça c’est américain, yeah. Alors allez-y les ricains, officialisez ça, adoptez-le une fois pour toute comme hymne national.

Dans la même veine patriotico-contestataire typiquement américaine, il y a le célèbre Born in the U.S.A. de Bruce Springsteen que me rappelle opportunément Nadia de Meylan dans un commentaire.

1 – Les chœurs de l’armée rouge en hommage à l’Amérique
2 – Un hymne de Michael Jackson
2bis – Propositions
3 – Chanteuses américaines
4 – Igor Stravinsky et Serguei Rachmaninov
5 – La soupe aux choux doit être l’hymne de l’Amérique : preuve par la musicologie
5bis – Jean Ferrat américain
6 – Jimi Hendrix
7 – Borat et Jim Carrey
8 – Les Simpsons

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Quand j’écoute Michel Sardou

Quel amateur de chanson êtes-vous (5/5) ?
1 – 2 – 3 – 45

Voilà le clou, l’acmé, le climax. Quand on écoute Sardou, on est submergé d’émotions : envie de laver sa voiture, de voter pour Giscard, de chanter au karaoké du camping de Cavalaire et peut-être même gagner le premier prix au tournoi de boules : un jambon. Si vous ne ressentez pas tout ça, vous n’êtes pas un vrai amateur de chanson. Le verdict est dur : vous êtes banni de radio Nostalgie à jamais. Et j’oubliais : en écoutant Sardou, on a envie de se prendre une murge à New-York.

 

Vous l’avez compris, je suis fan de La Java de Broadway, hymne final du beauf. Les paroles sont énigmatiques si on y prend garde. Car la java, ça ne swingue pas, même à Meudon. Et pourquoi plaît-elle ? Pourquoi cette intro en anglais d’école de commerce ? On a connu Pierre Delanoë plus précis, mais rarement plus inspiré… Citation de mon fils à qui j’essaye d’inculquer quelques valeurs : « Oui, elle est énigmatique cette chanson, mais derrière, c’est un tas de conneries ». Pffff, allez donc éduquer ces ados. Privé de radio Nostalgie.

Analyse de la vidéo : le chœur de filles n’est pas tout à fait en place. Le naturel y gagne ce qu’y perd le solfège et certifie une performance sans playback. La troisième choriste en partant de la gauche, c’est la chanteuse Christelle Chollet. Si vous aimez associer des chansons à ceci ou cela comme dans cette petite série de posts, regardez-la plutôt. Pas fin mais efficace.

 

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La java des bombes atomiques

Les scientifiques dans la chanson 3/12
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En préparant cette série, j’ai interrogé plusieurs personnes sur leur choix de chansons en rapport avec la science. On m’a fourni quelques trouvailles, chacun sera remercié quand sa chanson passera, mais pas aujourd’hui. Car quasiment tout le monde a cité La java des bombes atomiques de Boris Vian, qui est donc première au hit parade de la chanson scientifique.

À la différence de Brassens et Trenet, Vian savait vraiment de quoi il parlait quand il évoquait la science. Il était ingénieur, diplômé de l’École centrale des arts et manufactures, plus connue sous le nom de « centrale », ou « centrale Paris ». Cette proximité avec son sujet se remarque à plusieurs indices dans la chanson. Tout d’abord, la démarche scientifique de l’oncle est assez crédible, avec essais, succès, mais surtout erreurs.  Quelques traits psychologiques qu’on rencontre chez certains scientifiques sont discrètement suggérés : tendance à raconter son travail avec une certaine véhémence (« Et le soir il rentrait chez nous / Et nous mettait en trans’ / En nous racontant tout »); mépris pour les questions jugées peu stimulantes intellectuellement (« La question du détonateur, S’résout en un quart d’heur’ / C’est de cell’s qu’on écarte »); ou engagement de toute sa personne dans ses recherches (« On voyait à son air féroce / Qu’il tombait sur un os »). Tout cela, sans recours à aucun poncif ou expression toute faite, bravo Boris.

 

Reste à savoir si la chanson donne une bonne ou une mauvaise image des scientifiques. Ce qui est sûr, c’est qu’elle dénonce une catégorie encore plus infâme : les chefs d’état. Ceux là, il faut vraiment se décarcasser pour trouver une chanson à leur gloire : Bienvenue au Président Giscard d’Estaing, par Tchibanga.

 



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