Les CRS réhabilités

La chanson anti-soixante-huitarde 4/8
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Mai 68 fut le théâtre d’un affrontement entre étudiants et C.R.S. Il paraît que les étudiants criaient « CRS, SS », ce à quoi les CRS rétorquaient « Étudiant, diant-diant ».

Jean Yanne a écrit un hymne des C.R.S, suffisamment ironique pour avoir figuré un moment dans la playlist de Radio Libertaire. Mais comment savoir ce qu’il pensait vraiment ce bougre ? Générique de son film Moi y en a vouloir des sous, La marche des C.R.S., musique de Michel Magne.

Notez l’apparition dans le film du groupe Magma (déjà évoqué dans le billet sur l’avant-garde en Mai 68, ici), avec comme spectateurs Michel Serrault et Jean-Roger Caussimon en ecclésiastiques. Teddy Lasri est au saxophone soprano et le fondateur du groupe, Christian Vander, à la batterie.

Par la suite, le C.R.S. a été discrètement réhabilité comme personnage de chanson comique. L’idée est de jouer sur le décalage entre réputation de brute et situations plus romantiques. Bref, le C.R.S. presque aussi sympa et rigolo qu’Obélix. Dans la chanson comique, ce rôle contrasté est plus souvent tenu par le boucher, type moins polémique (avant que les vegans ne s’en mêlent bien sûr). On consacrera bientôt une série aux chansons de boucherie, il y en a plus qu’on ne le suppose. En attendant, Mon C.R.S. chanté par Annie Cordy.

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Manifestant professionnel

La chanson anti-soixante-huitarde 3/8
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On quitte la chanson aujourd’hui, car Mai 68 a donné lieu à quelques sketches plus ou moins caustiques : Jean Yanne et Daniel Prevost, Le manifestant professionnel. Notez que Daniel Prevost était présent dans la première vidéo du billet précédent, à croire qu’il a fait toute sa carrière dans l’anti-soixante-huitardisme primaire.

Les mêmes, avec L’appariteur musclé, c’est de l’humour vintage.

 

Le slogan « Il est interdit d’interdire » a été inventé par Jean Yanne. J’en profite pour livrer ma modeste contribution à la théorie du complot (il parait que c’est obligatoire de dénoncer un complot pour faire de l’audience sur internet).

Mai 68 n’a jamais existé. C’est un coup monté par Jean Yanne, mandaté par Pompidou et De Gaulle pour organiser une fausse révolution afin de programmer et gagner les législatives de juin 1968 ! Tous les films d’archives sont des faux, tournés par Jean-Luc Godard dans un studio installé sur la Lune (car en fait, la théorie du complot selon laquelle les Américains ne sont jamais allés sur la Lune est une intoxication des services secrets français, destinés à cacher le fait qu’ils y sont allés sur ordre de De Gaulle pour y filmer le faux Mai 68, vous me suivez ?). La preuve : Godard s’entrainait les années précédentes, regardez par exemple cet extrait de son film Week-End, un film de 1967. Jean-Pierre Léaud lit du Saint-Just, pendant que Jean Yanne et Mireille Darc déambulent tranquillement. Vous noterez aussi les cris de Mireille Darc au début : « Mon sac, mon sac », c’est un plagiat de Dom Juan de Molière, où Sganarelle crie « Mes gages, mes gages », encore une preuve que tout ça a été recopié à l’arrache. Vous n’avez jamais entendu parler de ce complot ? C’est bien la preuve de tous les efforts qui sont faits pour le dissimuler…

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L’œuvre de Jean Meyrand

La chanson anti-soixante-huitarde 2/8
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Le personnage du soixante-huitard se prête bien à la parodie à cause de toutes les contradictions de sa révolution bancale. Plus que dans la chanson, c’est dans la bande dessinée qu’on trouve le meilleur de cette veine, chez Claire Bretécher et surtout Gérard Lauzier et ses Tranches de vie. C’est hilarant, allez-y voir si vous ne connaissez pas.

Dans la chanson, je retiens Jean Meyrand, chanteur engagé imaginé par Bruno Carette. Son répertoire se limite à une seule chanson, La rue Lepic. J’aime bien le début : « 68, c’était hier pour moi aussi ». Pourquoi « pour moi aussi », hein pourquoi ? La chanson commence vers 2:25.

https://www.youtube.com/watch?v=tiop3zs4Qb4

En live à Bercy.

Par Renaud :

Et pour ceux qui se demandent à quoi ressemble vraiment la rue Lepic, Pierre Desproges nous explique.
https://www.youtube.com/watch?v=hh788oOGXAY

Sinon, Jean Meyrand aurait très bien pu chanter des tubes comme La Lambada, mais ce n’était pas un vendu !

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Les bonbons, version réactionnaire

La chanson anti-soixante-huitarde 1/8
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Nos cinq séries sur Mai 68 :
1 – Les cultures soixante-huitarde
2 – Mai 68 politique
3 – Les chansons de mai
4 – La chanson anti-soixante-huitarde
5 – Les nostalgiques de Mai 68

Voici la quatrième série sur Mai 68. Toute révolution entraîne une réaction. On aborde donc aujourd’hui la chanson anti-soixante-huitarde, répertoire assez abondant. De même que la chanson de Mai 68 n’a pas commencé d’exister le 1er mai 1968, la réaction à Mai 68 a commencé avant 68.

Exemple : Jacques Brel qui est très « soixante-huitard » en ce qu’il dénonce souvent les conventions sociales ou la religion avec l’énergie du défroqué. Mais qui n’hésite pas à se moquer de qui défile en « criant paix au Viet Nam ». Son public est enthousiaste, il est mûr pour tourner la page et passer directement à Sardou. Les bonbons, deuxième version de 1967. Pour voir la vidéo, il faut cliquer sur le lien ici.

Pour mémoire, vous pouvez écouter la première version de la chanson (1964).

Et puis une parodie par Jean Poiret, en présence de Brel !

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Le plus grand bluesman français est une femme

Qui est le plus grand bluesman français ? 8/8
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Voilà, on est tout au bout du chemin, et on n’a pas trouvé le plus grand bluesman français. Tout simplement parce que la question était mal posée. Le plus grand bluesman français, c’est une blueswoman, c’est une femme bien sûr : Madame Colette Magny.

Bravo à Partageux, qui a trouvé la bonne (quoique subjective) réponse dans un commentaire du 30 décembre. Précédemment, Pierre Delorme et NP s’étaient approchés de la vérité en proposant respectivement les blueswomen Édith Piaf et Véronique Sanson.

Je vous laisse écouter.

Saint James Infirmary, au Petit Conservatoire de Mireille, avec une interview à ne pas manquer au milieu de la vidéo.
https://www.youtube.com/watch?v=k3iUUNc2Vxs

Nobody knows you when you’re down and out (chanson déjà entendue dans la série, par Scrapper Blackwell).

Any Woman’s Blues.

L’original, par Bessie Smith.

Un reportage sur elle.
https://www.youtube.com/watch?v=60DbhEiBeJ8

Partageux m’a aussi proposé des chansons de Annkrist, merci pour cette découverte. Par exemple Prison 101. Peut-être une référence à 1984 de Georges Orwell ?

Ou encore Par la rue haute, qui sonne moitié celtique moitié blues d’Afrique de l’ouest.

 

Et pour finir, un autre blues d’une autre blueswoman. Janis Joplin, Turtle Blues. Paroles traduites ici.

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Ni Jean-Jacques Goldman, ni JeHan, ni Hubert-Félix Thiefaine, ni Jean-Jacques Milteau n’est le plus grand bluesman français (ni Personne ?)

Qui est le plus grand bluesman français ? 7bis/8
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C’est promis : demain, on met fin au suspense, on saura qui est le plus grand bluesman français. Un dernier points sur les nombreuses propositions des lecteurs du blog.

Merci à « Genzo le parolier » pour sa proposition d’authentiques blues de Renaud : Le blues de la Porte d’Orléans, et À quelle heure on arrive.

 

NP propose Jean-Jacques Goldman comme plus grand bluesman français avec à l’appui de cette hypothèse Reprendre c’est voler qui est assez blues. Je ne sais plus quoi inventer pour repousser toutes ces bonnes idées … Disons qu’il est trop optimiste ce bon J.-J. G.

https://www.youtube.com/watch?v=Z6pn_-arQO0&feature=youtu.be

 

Sur Facebook, Alain Berjon nous propose JeHaN qu’on a déjà vu sur le blog dans une veine plutôt réaliste (ici). Il excelle aussi dans le blues donc, avec par exemple cette reprise d’un grand succès de Michel Fugain, Je n’aurai pas le temps, extrait de son album La vie en blues. Tiens tiens, encore des paroles de Pierre Delanoë, ça avait suffit à éliminer Joe Dassin !

 

Loïc Perlman propose un duo, Paul Personne et Hubert-Félix Thiefaine. Le vieux bluesman et la bimbo. Très réussi, mais on cherche un seul plus grand bluesman français, ça ne peut pas être un duo.

 

Pierre Aboulker nous propose enfin l’harmoniciste Jean-Jacques Milteau. Ça ne compte pas, ici on ne s’intéresse qu’aux chanteurs ! Blues Harp.

https://www.youtube.com/watch?v=oRwU-jbnoh8

 

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Henri Salvador n’est pas le plus grand bluesman français

Qui est le plus grand bluesman français ? 7/8
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On a peut-être fait fausse route. Peut-être qu’il n’y a pas de blues français, tout simplement. Parce qu’il n’y a pas de champs de coton en France, parce qu’il n’y a qu’une très ancienne Orléans. Et on n’a pas de descendants d’esclaves noirs… mais si on réfléchit, il y a bien des descendants d’esclaves noirs en France, à la Guadeloupe, à la Martinique, etc. Si c’est là qu’il fallait chercher le plus grand bluesman français ?

J’ai un peu cherché dans cette direction, c’est une fausse piste. Pourquoi les Antillais feraient-ils du blues d’ailleurs ? Pointe-à-Pitre est à 2000 km de la Nouvelle-Orléans et on ne demande pas à Cabrel de chanter de  l’Occitan ou à Johnny du belge. Et puis les Antilles françaises ont inventé la biguine et le zouk. Voilà ce qu’écrit Bertrand Dicale sur le zouk dans son Dictionnaire amoureux de la chanson française.

[…] cette musique inventée à Paris par trois Guadeloupéens (Jacob Desvarieux et les frères Pierre-Édouard et Georges Décimus) va conquérir le monde, influencer durablement les musiques urbaines d’Afrique, de l’océan Indien et des Amériques latine et centrale, et pourtant ne sera considérée en France que comme une fantaisie pour dancing d’arrière-plage, quelque part dans les années 80. […] Alors on préfère ne pas percevoir qu’une révolution musicale porte la nationalité française. Et finalement, le reggae de Bob Marley est plus aisément soluble dans la culture française.

C’est vrai Monsieur Dicale : la France invente le zouk, chante son hymne national en reggae, mais ne parle que de blues ou de java dans les paroles de ses chansons, allez savoir pourquoi. Si vous vous intéressez aux Antilles et à la chanson française, je vous recommande l’émission de Benoit Duteurtre du 11 novembre 2017, avec comme invité Pascal Légitimus, en réécoute ici.

Il y a quand-même un célèbre blues, chanté et composé par un Antillais d’origine. Blouse du dentiste, musique de Henri Savador, paroles de Boris Vian. On reconnaît le genre parodique propre aux débuts du rock en France (voir notre série sur ce sujet, ici). The genius, Ray Charles en personne, n’en veut pas du tout au bon Henri.

Quel farceur vous faites Monsieur Salvador. Sans ça, vous seriez sûrement devenu le plus grand bluesman français. Et puis voilà du blues. Brownie McGhee, Pawn Shop Blues.

https://www.youtube.com/watch?v=qBaiFr8kK9M

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Ni Georges Brassens, ni Renaud ni Francis Cabrel n’est le plus grand bluesman français

Qui est le plus grand bluesman français ? 6/8
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Hasard du calendrier : ce premier billet de l’année 2018 est aussi le 500è billet du Jardin aux Chansons qui bifurquent ! Faites passer, partagez, abonnez-vous, faites suivre, et bonne année à tous !

Mais pour moi, aujourd’hui c’est le désespoir, j’ai le blues. Parce qu’on n’a toujours pas trouvé le plus grand bluesman français. On passe au bizarre, aux hypothèses les plus folles.

Brassens m’a été proposé dans un commentaire sur Facebook.  En fait, avant d’écrire cette série, j’ai lu quelque part que Brassens, finalement c’est du blues. Cette citation m’a d’ailleurs été rapporté par Pierre Delorme au début de la série. Impossible de trouver qui a dit ça au départ, help.

Je dois rejeter cette hypothèse : les musiques de Brassens n’empruntent pas grand chose au blues. Mais je pense que les tenants de l’hypothèse « Brassens » voient plutôt le blues comme un état d’esprit.  Alors cet homme qui tire seul sur sa pipe dans les bayous de l’étang de Thau en méditant sur la marche du monde et la démarche de la femelle du canard, il pourrait faire l’affaire. Et certaines de ses chansons ont quelque chose du blues… Le 22 septembre.

Mais non, ici, le blues, c’est le blues, yeah baby. Osons toutefois le pas prévu, bousculons nos certitudes. Tenez, par exemple, Renaud. Avez-vous remarquer que son H.L.M. ça peut sonner un peu comme un blues ? Mais de là à dire que Renaud est le plus grand bluesman français, alors là, je dis non, un vrai bluesman ça ne donne pas de coups de pied à des pigeons idiots (même pour de faux). Et ça ne vote pas Fillon.

Ou alors Francis Cabrel, qui m’a été proposé par Pierre Aboulker, internaute de bientôt quelque part espère-t-on. Il n’est pas mal du tout, très « root » à sa manière. Il a écrit des sortes de blues, comme Sarbacanne.

Ou encore La dame de Haute Savoie.

Je ne sais pas pourquoi il cache ça derrière des arrangements rocks ou variétoches. Car si on fait attention à la grille d’accords, on réalise que c’est pas loin d’un blues. Si la grille d’accords ne vous parle pas, contentez vous de cette preuve irréfutable : dans les paroles, Cabrel envisage la mort de son chien. Mais il ne va pas au bout de l’idée, il laisse ce désastre propre à donner le blues à l’état d’hypothèse.

Pour entendre La dame de Haute-Savoie comme un blues, il faut un peu fouiller le web à la recherche d’amateurs. Par exemple, une certaine Victoria. Soyez indulgent, le groove ne se met pas en place tout de suite :

Si vous aimez les vidéos d’amateurs, allez voir une autre version sympathique par Nathy&Mel

Bon, trêve d’amateurs. Monsieur Cabrel, vous êtes un grand professionnel. Mais n’oubliez pas que le Titanic a été construit par des professionnels et l’Arche de Noë par un amateur. Et puis je vous le dis tout net : vous auriez pu être le plus grand bluesman français, il fallait juste ne pas mettre ces arrangements variétoches partout, non mais. Et bien sûr faire mourir votre chien (dans votre chanson, je n’ai rien contre les chiens en dehors du blues). Et vouloir être un bluesman, zut. Non, mieux : ne pas avoir d’autre choix qu’être un bluesman, oh shit man, why ain’t gotta you the blues Francis ? Comme Skip James par exemple. Hard time killin’ floor blues.

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