Peau de vache

Paralipomènes (de vache) 1/8
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Cet été, il y aura une grande série, une énigme géante… En attendant, pour finir l’année, je vous propose des paralipomènes (= choses oubliées) : différentes chansons oubliées dans les thèmes passés ces derniers mois. Il n’y aura rien sur Mai 68. Ceux que ça chagrine peuvent se rabattre sur l’émission Tour de Chant, qui y a consacré deux excellents épisodes. En réécoute sur le site de France Musique, ici.

Dans le billet du 1er avril 2018, j’ai annoncé un tournant radical de ma ligne éditoriale en direction de la chanson pour vache. Dès le 2 avril, j’ai hélas laissé tomber cette bonne idée. Le sujet était pourtant prometteur… Le blog avait déjà passé Si les vaches avaient des ailes de Matthieu Côte ou le clip de Vice et versa des Inconnus. Il y a eu aussi Hécatombe, où une mégère crie « mort aux vaches ». Pour rester chez Brassens, je vous passe aujourd’hui Une jolie fleur (dans une peau d’vache).

 

Bonus : une vidéo de Georges Brassens très jeune, qui chante une ancienne version de la chanson, Le bout du cœur. Ces deux versions illustrent bien le travail de Brassens, qui laissait ses chansons sur le métier pendant de longues années.

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Darling darling

Paralipomènes 23/67
(la série qui revient en 68 billets sur les 44 premiers thèmes du blog)
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Dans la quatorzième série du blog, consacrée à Manu Chao, on parle de Darling, Darling, chanson popularisée par Mano Negra.

En fait, la chanson est un emprunt au répertoire d’un autre groupe, les Casse-pieds.

D’ailleurs, ici, je me demandais si le batteur de la Negra Bouch’beat, groupe de rock alternatif parodique imaginé par Les Inconnus (voir ici), n’était autre que Bibi, authentique batteur des Casse-pieds. Je suis aujourd’hui en mesure de confirmer cette hypothèse, preuve à l’appui ! On le reconnaît très bien sur la vidéo suivante. Rhaaa, j’avais raison (comme je dis toujours).

Pour ceux qui sont encore là, un reportage sur les Casse-pieds, qui étaient des experts de la manche dans le métro parisien. Il avaient mis au point un véritable process industriel, consistant à ne pas consacrer plus d’une station par chanson, ce qui permettait de maximiser les gains. Je les ai même vu une fois il y a bien longtemps.

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La complainte des filles de joie

Putain de métier 5/11
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En 1961, petit tremblement de terre dans la chanson : La complainte des filles de joie, de Brassens, hymne aux accents presque syndicalistes, ce qui est assez inhabituel chez le bon Georges. La rupture opérée par cette chanson est assez subtile. Car personne n’a attendu Brassens pour découvrir les tourments de la prostituée, dont la chanson réaliste ne cachait d’ailleurs rien, on l’a vu. Mais elle les mettait en scène dans l’univers pittoresque de la zone et des apaches, qui faisait le délice du bourgeois s’encanaillant aux concerts de Bruant (avant d’aller finir sa soirée au claque peut-être ?).

Réécoutez bien les quatre premières chansons de la série : la souffrance de la putain est belle comme une image pieuse teintée d’un zeste de Bovarysme dans L’accordéoniste, pleine de fantaisie et de légèreté dans Prospère et de misérabilisme dans Pauvre Pierreuse. Dans Cayenne, elle participe de la noblesse de la révolte sociale. Bref, elle est à chaque fois à une place, elle sert toujours à quelque chose ou à quelqu’un, elle est prostituée pourrait-on dire. Chez Brassens, la vie de la putain est donnée toute crue pour ce qu’elle est, dans une écriture simple et dénuée de jugement, de complaisance ou de voyeurisme. La chanson est d’ailleurs souvent reprise par des femmes, on l’a déjà noté dans la série masculin/féminin, ici.

Sur le site Analyse Brassens, on lit :

Le 16 juin 1976 le collectif des prostituées de Paris adresse à Georges Brassens la lettre suivante :
« Cher Georges Brassens,
Nous les Putains vous disons merci pour vos si belles chansons qui nous aident à vivre. Malheureusement nous n’avons eu votre adresse que très tard. Voici une invitation. Nous vous embrassons toutes.
Vos Copines du Collectif de tout cœur avec vous toujours. »

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Phonoscène

Le comique troupier 1/9
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On explore à partir d’aujourd’hui un genre un peu désuet : le comique troupier. On en a déjà vu quelques exemples dans ce blog, notamment dans le sketch des Inconnus Les chansons rétro, où Bernard Campan interprète une « chanson de pets », style hélas tout aussi désuet, voir ici, vers 3:30. L’interprétation et la gestuelle rappellent Polin, ici dans L’anatomie du conscrit.

Ce film de 1905 est une phonoscène, un des tout premiers procédés permettant de réaliser des scènes sonorisées. La prise de l’image et du son, ainsi que leur restitution, étaient indépendantes, il s’agit donc d’une sorte de play back. Cette phonoscène est réalisée par Alice Guy, véritable pionnière, première réalisatrice de l’histoire du cinéma, et ayant fait l’objet du tout premier making of, pour un phonoscène justement !

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Telle est la question sinusoïdale de l’anachorète hypocondriaque

Paroles cryptiques 8/9
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Pas question de quitter le thème des paroles cryptiques sans une petite blague… car le genre se prête naturellement à la parodie, Léo Ferré et Arthur Rimbaud ne nous en voudront pas. Vice et Versa, par Les Inconnus.

Au fait, je sais que ce blog est suivi par quelques internautes dont le français n’est pas la langue maternelle. Je leur propose un exercice difficile : chercher les nombreuses fautes de français glissées volontairement dans les paroles de la chanson du jour !

Sinon, j’ai peut-être dit un peu vite dans le dernier post que la poésie abstraite, ou hermétique n’avait pas d’exemple avant Rimbaud. Il y a eu Gérard de Nerval avant lui et son « épanchement du songe dans la vie réelle » (citation trouvée ici). Mais ça reste un cran en dessous de Rimbaud (en terme de « dérèglement de tous les sens »). El Desdichado, de Gérard de Nerval :

Je suis le Ténébreux, – le Veuf, – l’Inconsolé,
Le Prince d’Aquitaine à la Tour abolie :
Ma seule Étoile est morte, – et mon luth constellé
Porte le Soleil noir de la Mélancolie.

Dans la nuit du Tombeau, Toi qui m’as consolé,
Rends-moi le Pausilippe et la mer d’Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon cœur désolé,
Et la treille où le Pampre à la Rose s’allie.

Suis-je Amour ou Phœbus ?… Lusignan ou Biron ?
Mon front est rouge encor du baiser de la Reine ;
J’ai rêvé dans la Grotte où nage la Sirène…

Et j’ai deux fois vainqueur traversé l’Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre d’Orphée
Les soupirs de la Sainte et les cris de la Fée.

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La prime à l’ignorance à QPUC

Questions pour un champion 5/6
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L’un des aspects les plus curieux de QPUC est la prime à l’ignorance. Bien des contempteurs du jeu en ont une vague notion, quand ils notent que les champions ne sont pas « vraiment » cultivés (whatever that means). De nombreuses anecdotes soutiennent cette opinion, tel ce grand champion, vainqueur de cagnottes et joueur invincible de club, que j’ai vu répondre « 1923 » à la question de savoir quand les nazis avait pris le pouvoir. Il estimait s’être trompé de pas beaucoup, 1923 ne différant que d’un chiffre de la bonne réponse : 1933. La prochaine fois, il répondra peut-être 1833… le champion sait tout, mais rien de plus pourrait-on dire. Il serait même l’ignorant paroxystique : détenteur d’un bric-à-brac de faits anecdotiques, vide-grenier de la culture, chien savant, adepte d’une sorte de gonflette du cerveau, authentique déconstructeur du savoir, broyant tout l’édifice de la connaissance pour le réduire à des miettes débitables au 4 à la suite, faisant donc exactement le contraire de l’intellectuel véritable. Peut-être, et alors ? Du moment qu’on marque au 9 points gagnant, où est le mal ?

Au delà de ces jugements de valeurs sans intérêt, au jeu, la prime à l’ignorance est un phénomène bien réel. Abordée sous l’angle de la modélisation, on peut l’expliquer ainsi : plus la mémoire est grande, plus l’algorithme de récupération des informations est lent (un peu comme une bibliothèque : plus elle est grande, plus il faut de temps pour retrouver son bouquin). Donc, une mémoire vraiment gigantesque doit finir par être un handicap dans un jeu de rapidité. Ce phénomène ne s’observe pas vraiment à l’échelle humaine et à QPUC, sauf sur des sujets très précis et rarement abordés dans le jeu.

Par exemple, supposez que vous ayez des connaissances professionnelles en mathématiques, et qu’il y ait une question sur un théorème. Vous croyez être avantagé, vous en connaissez des dizaines, voire des centaines. Facteur psychologique non négligeable : vous ne voulez pas donner une réponse ridicule dans votre domaine d’expertise (erreur de débutant : on est déjà assez ridicule devant un buzzer, une fausse réponse ne vous rendra pas plus ridicule). Mais voilà, pendant que vous réfléchissez à tous ces beaux théorèmes, vos quatre adversaires buzzent chacun leur tour sans réfléchir pour dire : Pythagore, Thalès, Gauss et Pasolini. Bien sûr, la bonne réponse se trouve là dedans, vous vous faites doubler sur votre terrain, un spécialiste en bricolage-jardinage-collection-de-boite-à-camembert marque le point. Quel idiot celui-là. Mais le jour de votre revanche viendra, vous marquerez un jour en beuglant « Louis de Funès », parce que c’est le seul acteur que vous connaissez…

La prime à l’ignorance s’observe de manière aiguë si vous essayez de faire jouer des enfants que vous connaissez bien, les vôtres par exemple. Pour ne pas les dégouter du jeu, vous ne posez que des questions dont vous êtes sûr que tous les enfants soient au moins en mesure de comprendre la réponse. Invariablement, c’est l’enfant le plus jeune (et donc le plus « ignorant ») qui gagne, car c’est lui qui a l’espace de connaissances le plus petit à explorer, et comme vous vous arrangez pour que la réponse y soit, la prime à l’ignorance tourne à plein. Sauf si l’aîné joue « stratégique », et commence à entrer dans la psychologie de celui qui pose les questions… Enfin rassurez-vous : une ignorance réellement encyclopédique ne sert pas à grand chose (à QPUC du moins).

Pas facile de trouver une chanson sur l’ignorance… Jean Gabin, Maintenant je sais.

Et puis un petit jeu avec prime à l’ignorance, La famille en plomb, des Inconnus :

 

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Partenaire particulier

Parodies 4/6
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Vous souvenez de la célèbre parodie Isabelle a les yeux bleus, par Les Inconnus ? On l’a déjà passée dans le blog (ici). Il est souvent dit que ce sketch est une parodie du groupe Indochine. Mais à y regarder de près, coiffure à part, c’est beaucoup plus proche du groupe Partenaire Particulier, qui a connu la gloire avec le tube Partenaire Particulier dans les année 1980. À mon avis, la confusion provient du fait que Partenaire Particulier n’a pas vraiment besoin d’une parodie.

Pour mémoire, le sketch des Inconnus :

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Ils auraient mieux fait d’aller en cours de maths

Les scientifiques dans la chanson 5/12
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On continue cette laborieuse litanie des scientifiques à l’image plus ou moins dégradée dans la chanson : déicide chez Brassens, pénible chez Trenet, irresponsable chez Vian, et cinglé chez Walt Disney, que reste-t-il ? La figure du bon élève qui ne s’assume pas et qui monte un groupe de rock au lieu d’écouter en maths. Si si, écoutez bien, c’est dit au début de l’interview. Ça ne peut que faire de la musique de daube tout ça, et quelle perte pour la science (même s’il est finalement admis en « sup’ de co ») ! Isabelle a les yeux bleu, par Les Inconnus.




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Negra Bouch’beat

La carrière de Manu Chao 5/6
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Avec le succès est venue la parodie : un sketch assez drôle des inconnus singeant non sans lourdeur tous les tics du rock alternatif français : bric-à-brac musical, message politique simpliste, paroles débiles, manque d’hygiène ostentatoire, etc. La Negra’bouch Beat, parfois appelée Mano Verda, se veut la synthèse des Garçons Bouchers, des Negresses Vertes, d’Elmer Food Beat, et bien sûr de la Mano Negra.

Regardez bien sur la vidéo, dans la partie « interview », juste derrière Bernard Campan (le « leader » de la Negra’bouch Beat), se trouve un monsieur avec des lunettes, qui se présente comme « Bibi ». Je suis à peu près sûr qu’il s’agit de Bibi, authentique batteur du groupe les Casse-Pieds, dont Manu Chao a fait plus ou moins partie à un moment, et qui a composé une chanson assez connue de la Mano Negra, Darling. Ceci est plus ou moins corroboré par Wikipedia, ici, mais si quelqu’un peut confirmer par un indice plus solide (une photo d’époque ?)… En fait, j’ai trouvé, voir ici.

Plus généralement, je suppose que plusieurs authentiques musiciens et amateurs de rock alternatif de l’époque ont servi de figurant pour le sketch, si vous en reconnaissez, lâchez vous dans les commentaires.

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La chanson, c’était mieux avant …

Incroyable mais vrai – 5/6
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Ne restent que :

– Didier Bourdon
– Charles Trenet

À marier avec :
– Une chanson ouvertement antisémite
– Une chanson qui demande que tous les immigrés chinois rentrent dans leur pays

Aujourd’hui, il y a une astuce. La chanson antisémite est chantée par Julien Dragoul, chanteur collabo imaginaire, joué par Didier Bourdon dans l’excellent sketch des Inconnus, Les chansons rétro. Tout le sketch vaut le détour : il y a de la chanson réaliste, du comique troupier raffiné par Bernard Campan, de l’opérette, un bel hommage de Pascal Légitimus à Joséphine Baker. Et l’odieux Julien Dragoul, dont la voix semble s’inspirer de celle de Maurice Chevalier, mais dont le parcours caricature plutôt celui d’André Dassary, l’interprète de Maréchal, nous voilà !. Ça commence vers 5min40s.

Vous noterez que c’est la première chanson de ce blog dont j’ignore le titre…